2 mai 2017

Le triomphe de la médiocrité

Aucun pays ne s’enlise dans la médiocrité du jour au lendemain. Cela n’arrive pas non plus, en quelques années. C’est un long processus qui est le résultat d’une chaîne de calamités qui va de l’école à la classe dirigeante.
Nous avons créé une culture où les médiocres sont les élèves les plus populaires en classe, où les médiocres sont les premiers à avoir une promotion au travail, où les médiocres sont ceux que les médias invitent comme experts et les médiocres sont les seuls pour qui on vote aux élections sans nous soucier de ce qu’ils vont faire ou ont fait, juste parce que c’est le seul choix que nous avons.
Nous sommes tellement habitués à la médiocrité que nous avons fini par l’accepter comme l’état naturel des choses. Les exceptions, les rares fois où il y en a sont au niveau du sport, et nous servent à nier l’évidence.
 Médiocre est un pays dont les citoyens consacrent 2 minutes par jour à la lecture et au sport et 2 heures 14 minutes à regarder la télévision.
Médiocre est un pays qui après plus de soixante ans de son indépendance en est encore à vivre une perpétuelle transition démocratique.
Médiocre est un pays où les vieillards tentent de se suicider par désespoir.
Médiocre est un pays où un ministre en charge d’un secteur où la mortalité dépasse les 4000 morts par an a le temps de bloguer sur des questions religieuses.
Médiocre est un pays où le marché des trains rapides a été octroyé sans appel d’offres.
Médiocre est un pays où on a réformé le système éducatif un nombre incalculable de fois sans résultat pour ne produire que des cancres.
Médiocre est un pays où près de 8.5% des citoyens n’ont pas accès aux soins les plus élémentaires, ce qui représente plus du quart de la population globale.
Médiocre est un pays qui a la plus ancienne université dans le monde encore en activité mais dont aucune université n’est classée parmi les meilleures au monde et qui oblige ses meilleurs étudiants à s’exiler pour survivre.
Médiocre est un pays où l’intelligence provoque la jalousie, la créativité est marginalisée et la prise de décision sanctionnée.
Médiocre est un pays qui n’a pas de loi d’accès à l’information digne de ce nom.
Médiocre est un pays qui a fait de la médiocrité le grand idéal national, poursuivie sans complexes par des milliers de jeunes qui ne rêvent que d’un agrément, de politiques qui ne sont pas capables de produire une seule idée et de chefs qui s’entourent de médiocres pour cacher leur propre médiocrité et d’étudiants qui ridiculisent les camarades qui font un effort pour ne pas tricher.
Médiocre est un pays qui a permis le triomphe des médiocres, stigmatisant l’excellence jusqu’à ne lui laisser que deux options : dégager ou se diluer dans la marée grise de la médiocrité.