15 décembre 2009

Maroc : Un blogueur et un proprietaire de café internet condamnés à de la prison ferme

Condamnations prononcées aujourd'hui par le tribunal de Guelmim :  Le blogueur Bachir Hazzam a été condamné à quatre mois de prison ferme pour « diffusion de fausse information portant atteinte à l’image du royaume concernant les droits de l’homme ».  Le propriétaire d’un café Internet, Abdullah Boukhou,  a écopé d’une peine d’un an de prison ferme pour un motif similaire. Tous deux ont été immédiatement renvoyés en prison. 


''Reporters sans frontières a dénoncé les condamnations, prononcées ce jour par le tribunal de Guelmim (sud du pays), contre le blogueur Bachir Hazzam et le propriétaire d’un café Internet, Abdullah Boukhou. Le premier a été condamné à quatre mois de prison ferme pour « diffusion de fausse information portant atteinte à l’image du royaume concernant les droits de l’homme », le second a écopé d’une peine d’un an de prison ferme pour un motif similaire. Tous deux ont été immédiatement renvoyés en prison. Leur procès, ainsi que celui de plusieurs étudiants et militants, s’était tenu la veille, lundi 14 décembre. Ces derniers ont été condamnés à six mois de prison.
"Alors que le gouvernment marocain a présenté, en octobre dernier, un plan visant à améliorer l’accès à Internet afin de mieux intégrer le royaume à la société de l’information et à l’économie numérique, ces condamnations marquent un retour en arrière et montrent que la liberté d’expression sur Internet ne s’appliquent pas aux critiques des autorités", a déclaré l’organisation. " Bachir Hazzam et Abdullah Boukhou n’ont commis aucun acte illégal. Bachir Hazzam a seulement posté un communiqué déjà rendu public sur la répression exercée par les forces de l’ordre lors de manifestations étudiantes à Taghjijte, à 200 km au sud d’Agadir. Abdullah Boukhou est accusé d’avoir envoyé des informations et des photos sur ces événements. Au lieu de jeter ces innocents en prison, les autorités feraient mieux d’enquêter sur les abus commis par les services de sécurité locaux."
Bachir Hazzam a été arrêté, le 7 décembre 2009, trois jours après avoir publié sur son blog un communiqué diffusé par des étudiants au sujet des manifestations du 1er décembre à Targhjijte, dont les revendications portaient sur des questions liées au transport et au logement. Dans ce communiqué, les étudiants dénonçaient une utilisation disproportionnée de la force par la police et les autorités locales. Plusieurs étudiants ont été arrêtés. Certains cybercafés auraient également été fermés temporairement, d’autres auraient été soumis à une étroite surveillance pour empêcher la diffusion d’images ou d’informations, d’après le Arabic Network for Human Rights Information (ANHRI). La date d’arrestation d’Abdullah Boukhou serait également intervenue à la suite des manifestations.''
Reporters sans frontières.

Nouvelle tragédie judiciaire. Jugements ignobles et indignes de ce pays redevenu totalitaire et qui s’appelle le Maroc. Voici donc où nous en sommes : Dans un pays qui jette en prison des citoyens pour le seul crime d’avoir exercé pacifiquement leur droit à la liberté d’expression et à la manifestation: Un an de prison ferme pour un propriétaire de cybercafé pour avoir diffusé des informations sur une manifestation ; Quatre mois fermes pour un blogueur pour en avoir rendu compte. Un drôle de pays qui, aussitôt la page des années de plomb tournée, en a ouvert une autre avec son lot d’exactions, de condamnations arbitraires, de violences policières et d’atteintes aux droits humains. Il ne manque plus que la construction d’un Tazmammart pour journalistes et bloggueurs et le Maroc retrouvera ses années de plomb.
J'ai mal pour mon pays !


Billet publié par Larbi sur son blog.

 

13 décembre 2009

Pourquoi le voile ?

L'islam, en tant que culture et en tant qu'entité politique, est imprégné de l'idée que la femme est une force incontrôlable - un 'autre' insondable. Tous ces débats sur les droits de la femme qui secouent actuellement les parlements des États musulmans, de Dakar à Djakarta - débats passionnés sinon hystériques - , sont, en fait, des débats sur le pluralisme. Et s'ils se sont focalisés sur la femme, c'est bien parce que celle-ci est 'l'étranger' à l'intérieur de la umma, la communauté islamique. La femme est le symbole de la différence et donc de la nature hétérogène de la umma. Elle force la communauté, par sa simple apparition comme acteur à part entière (donc dévoilée) dans l'espace public où la décision politique se prend, à s'accepter comme étant composée d'éléments hétérogènes, et donc à gérer la diversité. Rien d'étonnant, donc, à ce que la prmière décision de l'imam Khomeyni, fondateur d'une paradoxale 'république' islamique en 1979, fut de voiler les femmes. Élections, oui. Pluralisme, non. L'imam savait parfaitement ce qu'il faisait. Il savait qu'en permettant aux femmes de siéger sans voile dans 'son' parlement islamique, il aurait reconnu implicitement que la umma, la communauté des croyants, n'est pas homogène : Admettre sa diversité aurait impliqué une gestion pluraliste.
Pourtant, dans la première cité musulmane, la Médine du prophète, où le droit au pluralisme et à la divergence était la règle, Sukaina bint al Hussain, la petite-fille du prophète, siégeait au majliss de Quraich, l'équivalent des parlements modernes. Elle était même renommée pour être barza, c'est à dire qu'elle refusait de porter le voile.
Fatema Mernissi, Le Harem et l'Occident

12 décembre 2009

Le catastrophomètre

Il s'agit d'une 'invention pour donner une nouvelle mesure de qui vous êtes, d’où vous venez et où vous allez dans la vie.' Le catastrophomètre originale utilise les informations de votre situation sociale au moment des évènements suivants : La tuerie de la polytechnique, le 11 septembre 2001 et aujourd'hui. Pas mal de blogueurs québécois s'y sont adonné et il semble même que ça se propage comme une traînée de poudre. Bien que ça soit un exercice assez personnel, j'ai décidé de m'y prêter et à le publier. Si des blogueurs de la Blogoma voudraient y adhérer à leur tour, ils pourraient alors changer les évènements précédents pour ceux qui les ont vraiment touchés personnellement.
Polytechnique (poly)
: Je ne suis encore qu'un ti-cul du Tiers-Monde qui découvre les méandres des relations en société : Je me rends compte que plus tu joues bien au foot et t'as pas honte de parler aux filles, plus les fils à papa ont tendance à t'inviter dans leurs villas et plus les saligauds du quartier où on restait avaient eux tendance à me chercher noise.
Des années plus tard (l'an 2000), quand j'ai rencontré 'Leaticia Casta', j'ai appris toute l'horreur qui s'était passé à Poly et qu'une de mes futures belle-tantes avait reçu pas moins de quatre balles lors de ce 6 décembre 1989. Le lendemain, en retournant à Poly pour mes cours, je posais un tout autre regard sur 'mon' école.
11 septembre : J'étais en 2e année de génie informatique à Poly ; la vie est belle : 'Leaticia Casta' a déménagé avec moi et je commençais à me plaire au Québec. Je n'étais par contre plus sûr de vouloir être un ingénieur et je me demandais si je n'avais pas fait une connerie en me laissant convaincre que parce que j'étais bon en maths, je ferai un bon ingénieur.
Le matin du 11 septembre, j'ai un cours d'économie et quand j'arrive à Poly, je trouve pas mal d'étudiants dans le hall d'entrée et à l'étage de la cafétéria, ils regardent tous les écrans télé et se parlent plus à eux-mêmes qu'aux autres personnes autour d'eux. Je décide alors de retourner chez moi pour suivre cela à la télé, je n'arrive tout simplement pas à croire qu'il y ait des malades pour poser un tel geste. Je ne réalise pas encore que cet épisode aura autant d'impact sur le monde arabo-musulman et je me rappelle avoir penser que les étasuniens n'allaient pas être contents; mais j'étais loin de me douter que cet épisode, que les occidentaux trouvent si effroyable, allait avoir autant d'incidences catastrophiques sur le Moyen-Orient et allait surtout servir de prétexte pour mettre tous les arabo-musulmans dans le même sac, celui des terroristes.
Aujourd'hui : Je suis un 'jeune' professionnel travaillant dans le domaine des finances ; mardi dernier, j'ai appris que mon contrat n'allait pas être renouvelé et que je devrai donc mettre à jour mon CV. Je me pose encore pas mal de questions sur ma carrière et je me demande surtout si je veux rester au Canada ou bien rentrer au Maroc. Plus je vieillis, plus j'abhorre comment la société fonctionne et une petite voix dans ma tête n'arrête pas de me dire que tout ceci n'est que de la poudre aux yeux. Cependant, la Vie finit toujours par me réconcilier avec le genre humain et je me dis qu'il faut bien donner la chance au coureur.